Accéder au contenu principal

Green Book : je ne suis pas ce que je mange


Tony Lip (Viggo Mortensen) a un sacré appétit. Il a un jour mangé quarante-huit cheeseburgers lors d’un concours et, suite à un pari, il se fait 50$ en avalant vingt-six hot-dogs - avec toppings - en moins d'une heure. 

La nourriture tient une place centrale dans son quotidien et dans les lettres qu’il écrit à sa femme, il ne raconte pas grand-chose excepté le menu du dernier repas. 

Il est aussi un homme simple : quand on lui demande un avis sur le plat dans son assiette, il se contente de répondre «  salé... ». Si l'on se moque de ce jugement à l'emporte-pièce, le gourmand rappelle une évidence : « saler, c’est tricher. Tout chef peut saler. Que ce soit bon sans sel, c’est la difficulté. »

Tony Lip, de son vrai nom Vellelonga, est aussi un Italien jusqu’au bout de la fourchette. Il raffole des spaghettis-boulettes préparés par sa femme et se bouffe dans le lit une pizza entière qu’il plie en deux. 



En cette année 1962, l’Italien est embauché par une compagnie de disques pour conduire le pianiste viruose Don Shirley (Mahershala Ali) lors de sa tournée à travers le sud des États-Unis.

Quand les deux hommes deux traversent le Kentucky, Tony Lip est tout excité, car il va pouvoir manger du
Kentucky Fried Chicken  du Kentucky !



Aussi, l’Italien ne croit pas une seconde le musicien quand ce dernier lui explique qu’il n’a jamais mangé de poulet frit de toute sa vie. Le chauffeur s’exclame : 

« Vous me prenez pour un con ? Les Noirs adorent le poulet frit, le maïs et les légumes verts. Je les adore aussi. Dans l’armée, les Noirs dans les cuisines en faisaient tout le temps. » 

Les préjugés raciaux ont la peau dure... Don Shirley, qui ne va quand même pas se laisser apprendre par un blanc ce qu’est être noir ou non, n’a pas le courage de lui expliquer une chose simple : je ne suis pas ce que je mange.

Si l'on peut affirmer son identité à travers son alimentation, comme le fait Tony l'Italien, l'inverse n'est pas vrai.


Heureusement, le film offrira la possibilité à Tony Lip de soigner son racisme. La réconciliation des peuples débutera donc grâce au KFC, puisque Tony initie son boss aux joies du poulet frit, accompagnant le tout d’une sentence imparable :

« Quand tu bosses, bosse. Quand tu rigoles, rigole. Quand tu manges, dis-toi que c’est ton dernier repas. »

Green Book (2018), de Peter Farrelly, avec Viggo Mortensen, Mahershala Ali, Linda Cardellini


Commentaires

Posts les plus consultés de ce blog

Les meilleures répliques de films sur la bouffe (1)

« Moralité, je me suis bourré de pistaches comme un con »  Jean-Pierre Bacri, Cuisine et dépendances « Comment est votre blanquette ? »  Jean Dujardin, OSS 117 : Le Caire, nid d’espions « Ça doit être les moules qui sont avariées » , Benoit Poelvoorde, C’est arrivé près de chez vous « Spartiates ! Mangez vos victuailles avec appétit... car nous dînerons en enfer ce soir ! » Léonidas, 300 « Tu es bella comme la papaya »  Stuart, Les Mignons « Dis, on t’as jamais appris à manger avec la bouche fermée toi ? C’est à toi qu’je cause hein ! J’ai l’impression d’être à côté d’un camion poubelle qui travaille moi, ici ! Conasse va ! » François Damiens, Dikkenek « Laisse le flingue, prends les cannelloni »  Peter Clemenza, Le Parrain « Il doit y avoir une erreur, vous m’avez donné accidentellement la nourriture que ma n...

Les Visiteurs : l’art de (pas) bien se tenir à table

« Ou sont les poulardes ? J’ai faim ! Où sont les veaux, les rôtis, les saucisses ? Où sont les fèves, les pâtés de cerf ? Qu’on ripaille à plein ventre pour oublier cette injustice ! Y’a pas quelques soissons  (1)  avec de la bonne soivre (2) ? Un porcelet ? Une chèvre en rôti ? Quelques cygnes blancs bien poivrés ? Ces amuse-bouches m’ont mis en appétit !!! » Pendant que le comte Godefroy de Montmirail (Jean Réno) beugle son menu idéal en tapant sur la table, son serviteur Jacquouille la Fripouille (Christian Clavier) perce l’opercule de son yaourt avant de l’engouffrer à la main, s’en barbouillant le visage.  Quelques scènes avant, Jacquouille se servait de la salade avec les mains avant de recracher le tout. « Pardonnez ce maroufle, mais il est si triste d’apprendre qu’un gueux possède Montmirail » , justifiait le comte.     S’ensuit les ver...

Le Voyage de Chihiro : la nourriture à tous les étages

La nourriture est indissociable des films du studio Ghibli, tant et si bien qu'en 2017 naissait sur Instagram le hashtag #GhibliFood.  Petite revue des nombreuses fonctions de la bouffe dans Le Voyage de Chihiro .   - Un péché d'orgueil Dans cette ville à l'abandon, les parents de Chihiro découvrent un stand richement garni de mets délicieux. Ils s'empressent de s'assoir et de se baffrer. La fillette est mal à l'aise et s'inquiète de ce que diront les gens du parc. "J'ai ma carte de crédit" répond le père. Les parents représentent un Japon moderne, consumériste, faisant peu de cas d'autrui. Leur orgueil (et gourmandise) sera puni puisqu'ils seront transformés en gros cochons.     - Un antidote Lorsque la nuit tombe sur le parc, Chihiro commence à disparaitre. Haku lui donne une baie à manger afin qu'elle ne se transforme pas en cochon.     - Un moyen d'échange Face au refus de Lin de s'occuper de Chihiro, le viellard-araig...