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The Host : manger avec les absents


Si Bong Joon-ho est le cinéaste de la monstruosité sous toutes ses formes (un tueur dans Memories of Murders, une créature aquatique dans The Host, notre alimentation dans Okja ou même le corps social dans Snowpiercer et Parasite), il est aussi celui de la nourriture. Parasite pourrait faire l’objet d’un post à lui seul.

Mais concentrons-nous sur The Host


Bienvenue chez les Park, famille coréenne dysfonctionnelle.

Gang-du, père looser au grand cœur, tient un snack au bord d’une rivière de Séoul. Il élève seul la petite Hyun-seo depuis que la mère a foutu le camp à la naissance de leur fille. Gang-du a une sœur championne ratée de tir à l’arc et un frère universitaire ès chômage longue durée.

Le grand-père, seule figure solide, colmate du mieux qu’il peut les fissures de chacun. 

Un tragique événement va pourtant ressouder cette famille : l’enlèvement de la fillette par un affreux monstre marin sévissant dans la rivière. Gang-du manque plusieurs fois d’être avalé par la créature en tenant de sauver sa fille.

Il tentera de se consoler en avalant des petits calamars crus en conserve. Manger ou être mangé, tout n’est qu’une question d’échelle. 

Au cours de cette quête pour retrouver Hyun-seo, le grand-père et ses trois enfants se retrouvent dans le snack afin de partagent un dîner – nouilles instantanées et quelques trucs à grignoter. Ils mangent en silence.

Soudain, une main apparaît et agrippe le bras de Gang-du.
 


Sa fillette se redresse de derrière la table basse et attrape l’un des plats. L’esprit de Hyun-seo est présent. Chaque membre de la famille va lui donner à manger.



La scène nous rappelle cette belle idée : la commensalité, le fait de partager un repas à plusieurs, autour d’une table, est le nœud de la famille et a le pouvoir d’atteindre un au-delà, là où l’on retrouvent ceux qui (nous) manquent. Manger ensemble, c’est donc aussi manger avec les absents.

The Host (2006), de Bong Joon-ho, avec Song Kang-ho, Bae Doona, Go Ah-seong. 

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