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Articles

Affichage des articles du février, 2019

Olivia : maths Vs. tartines

Fontainebleau, fin XIXe. Mademoiselle Julie et Mademoiselle Cara sont les deux directrices d’un pensionnat de jeunes filles. Elles forment également un couple battant de l’aile. Pensionnaires et professeures ont choisi leur camp : il y a les « pro-Cara » et les « pro-Julie ». Mais l’arrivée d’une nouvelle élève, Olivia, va bouleverser cet équilibre déjà précaire. En faisant d’Olivia sa protégée, Mademoiselle Julie provoquera chez la jeune fille des sentiments ardents... Sous ses atours de gentillet (et si pudique) film de pensionnat, Olivia est un redoutable éloge de l’homosexualité féminine. Il est signé Jacqueline Audry, flibustière du cinéma des années 50, car elle osa proposer des films féministes contestant la domination patriarcale – au lendemain de la guerre, l’homme français vaincu et occupé se doit de réaffirmer son pouvoir sur la femme et le cinéma demeure le meilleur outil pour la remettre à sa place.  Il va sans dire qu'à sa sortie Olivia s'est

Phantom Thread : omelette de la mort

Un welsh rarebit, avec un œuf poché dessus. Du bacon. Des scones. Du beurre. De la crème. De la confiture, mais pas à la fraise. Du thé, Lapsang. Et quelques saucisses.  Quand il petit-déjeune dans ce restaurant sur la côte, après avoir roulé toute la nuit, Reynolds Woodcock (Daniel Day-Lewis), commande pour quatre. Un appétit gargantuesque tranchant avec son personnage d’austère couturier. Pourtant, la veille, lors du petit-déjeuner, Reynolds avait envoyé paître sa compagne lorsque celle-ci lui proposa une simple brioche : « N’oublie pas ce que j’ai dit, Johanna. Je ne veux plus de choses indigestes » , cingla-t-il, sans lever les yeux de son carnet à dessins. La pauvre sera congédiée le jour même. Le spectateur, lui, est prévenu : les appétits contradictoires de Woodcock Reynolds ne sont que l’élégante manifestation d’un égoïsme le plus crasse. Retour au restaurant. Alma (Vicky Krieps), serveuse, est intriguée par cet homme si chic et affamé. Lui est intri

Conte de Printemps : repas bavard

Chez Éric Rohmer, on cause, on cause, on cause, on cause, on cause, on cause, on cause, on cause, on cause, on cause, on cause, on cause, on cause, on cause, on cause, on cause, on cause, on cause... Mais on n’oublie pas de manger ! Car parler donne faim.  Et puis, préparer le repas n’empêche pas de causer encore et encore, comme le font Natacha et Igor dans Conte de printemps . Admirez d’ailleurs ce magnifique levé d’auriculaire d’Hugues Quester lorsqu’il coupe la tomate.   Avec Rohmer, c’est souvent à la bonne franquette. Ici, tomates, saucissons et quelques olives pour casser la graine.  D’où vient cette obsession des repas pour Rohmer ? De son enfance, explique dans cette  vidéo  sa productrice et collaboratrice Françoise Etchegaray :   « Il a eu très faim pendant la guerre. La nourriture était pour lui quelque chose de très important, parce qu’il a vraiment eu faim.  »   «  Et il a eu faim après parce qu’il n’avait pas beaucoup d’argent et qu’il a mangé pendant

Léon : garçon, l'addition !

La scène suivante, le public ne la connaît pas. Elle est uniquement présente dans la version longue éditée en DVD en 1996 et n'a jamais été doublée. Elle est donc absente des rediffusions TV du film. Ce n'est pas une scène anodine, puis qu'elle accentue l'ambiguïté de la relation entre Léon et Mathilda. Nous sommes dans un restaurant très chic. Les deux personnages célèbrent leur premier contrat réussi ensemble : l'assassinat d'un dealer - scène également coupée de la version exploitée en salle - qui est l'occasion pour la jeune fille d'un cours sur l'art d'être une bonne tueuse à gages : Une première balle pour mettre K.O. Puis une deuxième. Par sécurité. Vers le coeur et les poumons. Jamais dans la figure.    "S'ils ne reconnaissent pas le client, tu n'es pas payé" , explique le "nettoyeur" à la fillette. Pour fêter cette mission, le duo partage une bouteille de champagne au resto. L'ambiance es