Accéder au contenu principal

Delicatessen : Carnistes Vs. Vegans

Nous avions déjà parlé ici ou de cannibalisme. Maintenant, on s’attaque à une pièce de choix avec le Delicatessen de Jeunet et Caro. Dans un monde post-apo, un concierge (Dominique Pinon) prend ses quartiers dans un immeuble isolé en banlieue. L’endroit se révèle très particulier : le boucher (Jean-Claude Dreyfus), dont l’échoppe est sise au rez-de-chaussée, à la mauvaise habitude de découper en viande fraîche chaque nouveau concierge. Et ce, afin de nourrir le reste de l’immeuble. Pour ne pas mourir de faim, autant manger son voisin !
 


D’un côté, il y a donc les carnistes, qui ont un peu de compassion pour leur bifteck, avant de nouer leur serviette et d’avaler goulûment leur assiette. Il y a la fille du boucher, qui s’éprend du concierge, serait flexivore : OK pour manger de la viande, mais pas tout le temps et quand même pas le nouveau voisin du 5e, surtout s’il est aussi gentil que Dominique Pinon. De l’autre côté, il y a les Troglodistes, végétariens qui tournent à graine.




 Les Troglodistes sont une société secrète vivant dans les égouts et militant pour une nourriture sans viande. Dans une interview, Marc Caro confiait être lui-même végétarien et avoir voulu faire un film pro-végétarien. Jean-Pierre Jeunet, lui, expliquait l'origine du film :

« J'habitais au-dessus d'une boucherie et j'étais réveillé tous les matins par les coups de hachoir. Ma copine de l'époque me disait : « Ils sont en train de tuer les locataires là-haut, et ils descendent chaque jour d'un étage. Ça va arriver chez nous, il faut vite qu'on déménage ! »

Delicatessen, grand film pro-végétarien ? Pas sûr...

Si le film est évidemment anti-carniste – les mangeurs de viande sont présentés comme des abrutis finis – il n’est pas tendre non plus avec les végétariens. Les Troglodistes sont une bande de crasseux, gentils mais pas futés. Tous ont une gueule pas possible et ils ne sont pas érigés à modèle à suivre.




Quant à notre gentil concierge, à aucun moment il nous est montré comme végétarien ou non.


Toutefois, Delicatessen est malin sur un point : les Troglodistes sont présentés par la presse officielle comme des « terroristes ». Le film, sorti en 1991, anticipe déjà la mauvaise fois dont certains carnistes font aujourd’hui preuve : faire passer les vegans pour des gens qui n’aiment que les animaux et haïssent le reste de l’humanité.
 


« Ces pédés de bouffeurs de légumes, ils ne perdent rien pour attendre... », jure le facteur fascite, dans Delicatessen.

Aujourd’hui, on est tous évidemment choqué par l’insulte homophobe. Mais un nouveau mal guette : la végéphobie. Se moquer des végétariens/veganes au cinéma n’est évidemment pas un problème, mais il faudrait aussi penser à proposer des personnages positifs de végétariens/vegans. Soyons attentifs aux prochains films à venir. Qui sait...  


Delicatessen (1991), de Jean-Pierre Jeunet et Marc Caro, avec Dominique Pinon, Jean-Claude Dreyfus

Commentaires

Posts les plus consultés de ce blog

Les meilleures répliques de films sur la bouffe (1)

« Moralité, je me suis bourré de pistaches comme un con »  Jean-Pierre Bacri, Cuisine et dépendances « Comment est votre blanquette ? »  Jean Dujardin, OSS 117 : Le Caire, nid d’espions « Ça doit être les moules qui sont avariées » , Benoit Poelvoorde, C’est arrivé près de chez vous « Spartiates ! Mangez vos victuailles avec appétit... car nous dînerons en enfer ce soir ! » Léonidas, 300 « Tu es bella comme la papaya »  Stuart, Les Mignons « Dis, on t’as jamais appris à manger avec la bouche fermée toi ? C’est à toi qu’je cause hein ! J’ai l’impression d’être à côté d’un camion poubelle qui travaille moi, ici ! Conasse va ! » François Damiens, Dikkenek « Laisse le flingue, prends les cannelloni »  Peter Clemenza, Le Parrain « Il doit y avoir une erreur, vous m’avez donné accidentellement la nourriture que ma nourriture mange »  Ron Swanson, Parks & Recreation « Oui, Londres. Vous savez bien : fish & chips, tasse de thé, bouffe dégu

Les Visiteurs : l’art de (pas) bien se tenir à table

« Ou sont les poulardes ? J’ai faim ! Où sont les veaux, les rôtis, les saucisses ? Où sont les fèves, les pâtés de cerf ? Qu’on ripaille à plein ventre pour oublier cette injustice ! Y’a pas quelques soissons  (1)  avec de la bonne soivre (2) ? Un porcelet ? Une chèvre en rôti ? Quelques cygnes blancs bien poivrés ? Ces amuse-bouches m’ont mis en appétit !!! » Pendant que le comte Godefroy de Montmirail (Jean Réno) beugle son menu idéal en tapant sur la table, son serviteur Jacquouille la Fripouille (Christian Clavier) perce l’opercule de son yaourt avant de l’engouffrer à la main, s’en barbouillant le visage.  Quelques scènes avant, Jacquouille se servait de la salade avec les mains avant de recracher le tout. « Pardonnez ce maroufle, mais il est si triste d’apprendre qu’un gueux possède Montmirail » , justifiait le comte.     S’ensuit les vers d’une chanson où il s’agirait de peler le jonc comme au bailli du Limousin qui fût appa

Les Misérables : spaghetti alla Lino Ventura

« T’as qu’à te trouver à table avec Lino... Ben mon vieux, Lino : c’est du sérieux ! Tu parles d’un quadrille de mâchoires ! Il nous rend double-six à tous ! Parce que je me souviens, à la maison, d’un petit salé aux lentilles une fois, et d’un cuisseau de sanglier une autre fois... Mon vieux... Tu croirais qu’il va te tuer, Lino, quand il mange ! Tu croirais qu’il va te tuer ! T’oses plus parler ! T’entends les mâchoires qui font clac, clac, clac ! Tu te dis : ” Merde ! Si je m’approche, il va me buter ! ”  Tu peux pas savoir ce que c’est ! Il est champion du Monde, lui ! » Le compliment est de Jean Gabin, ce qui n’est pas rien. Les deux hommes se marraient bien ensemble, par contre ils ne plaisantaient pas dès qu’il s’agissait de gueuletonner. L’un et l’autre avaient la réputation d’avoir un sacré coup de fourchette. L’archive INA qui suit donne un entr’aperçut de la chose : En 1982, Lino Ventura est dans le Périgord pour tourner Les Misérables où il joue Valjea